À première vue, personne ne l’aurait prédit. Depuis début 2008, le cours des actions des grands groupes d’électricité suisses Alpiq (les actionnaires sont en particulier les cantons, les villes et les communes de la Suisse romande) et FMB (détenu à 52,54 % par le canton de Berne) ont suivi un développement similaire à celui des actions de l’UBS secouée par la crise. Autrement dit: les actionnaires des groupes fournisseurs d’électricité ont perdu autant d’argent que les actionnaires de l’UBS. Quelles leçons devraient en tirer les cantons?

Le graphique ci-contre montre bien que, d’un point de vue économique, les participations des cantons aux fournisseurs d’électricité sont plus que discutables – et cela à double raison. D’un côté, le développement du cours démontre que leur intention de mettre en œuvre leur propre politique énergétique est vouée à l’échec: la réglementation des marchés se fait au niveau national et, en partie, international – et les prix se fixent de toute façon au niveau international. Dans un tel contexte, les stratégies et les structures organisationnelles motivées politiquement n’apportent rien d’autre que des pertes en efficacité et entravent au contraire le bon fonctionnement du marché. De plus, elles ne contribuent en rien à la sécurité de l’approvisionnement.

Des risques démesurés

D’un autre côté, les risques économiques que les cantons courent en tant qu’actionnaires majoritaires de ces entreprises sont énormes. Si la participation du canton de Berne à la FMB affichait fin 2007 encore une valeur d’environ 4 Mrd CHF, elle ne vaut aujourd’hui qu’à peine 1 Mrd CHF. Cette perte ne ressort pas des comptes du canton – pour la simple raison que la participation à la FMB est inscrite avec une valeur nominale d’environ 70 Mio CHF. Si les cantons devaient représenter leur situation financière comme les entreprises privées, tout le monde se rendrait compte des risques conséquents que ces participations engendrent pour les finances cantonales et pour les contribuables.

La participation des cantons à ce type d’entreprises est non seulement contraire aux principes d’une société ouverte, prônant la libre concurrence et le droit privé, mais manque surtout de sens d’un point de vue économique. Les dividendes n’y changent rien – ils pourraient très bien être remplacés par des impôts. Dans le marché risqué de l’électricité, les actionnaires privés bien diversifiés sont mieux à même de supporter les risques que leurs semblables cantonaux.