Le système du 2e pilier a besoin d’une «cure de jouvence», pour reprendre le titre de l’ouvrage de Jérôme Cosandey et Alois Bischofberger, économistes auprès d’Avenir Suisse. Le livre (Editions NZZ Libro) était présenté hier à la presse. Sa version française suivra au début de l’année prochaine.

La société a profondément évolué depuis l’introduction du 2e pilier en 1985, la prévoyance n’a pas accompagné le changement: 300 000 personnes travaillent pour deux employeurs ou plus en même temps dans leur vie professionnelle. L’employé ne reste plus toute sa vie collé à une seule et même entreprise. Par ailleurs, le taux de divorce a explosé à plus de 50% et de nombreuses familles sont recomposées.

Avenir Suisse propose des réformes basées sur les principes libéraux d’un assuré adulte, libre et responsable, et non plus placé sous la tutelle de l’employeur ou de l’Etat. «Aujourd’hui, le système suppose que tous les hommes chaussent du 43 et toutes les femmes du 38», a déclaré l’économiste lors d’une interview. «80% des gens ne peuvent pas marcher avec ces chaussures standards», ajoute-t-il. Tous les règlements de caisses de pension fonctionnent de la sorte. La seule possibilité d’influencer les prestations démarre avec un salaire supérieur à 125 000 francs (10% de la population), si la caisse de pension sépare ces hauts salaires dans une caisse particulière. Une marge de manoeuvre n’existe donc que pour 1 à 2% de la population. Avenir Suisse aimerait étendre cette possibilité au moins à 40% de la population en abaissant la barre au niveau du sur-obligatoire (83 000 francs).

Baisse du taux de conversion

L’introduction de ce choix créerait davantage de concurrence, laquelle serait surtout renforcée avec l’introduction du libre choix de la caisse par l’assuré. Des 2300 caisses actuelles, le nombre pourrait en effet descendre à 250. Les 2000 caisses les plus petites paient 30 points de base de plus pour leur gestion de fortune, soit 300 à 400 millions par an que si elles étaient intégrées. Des économies sont possibles ainsi qu’en témoigne la concurrence existant en Suède, en Australie, au Chili ou en Angleterre.

Le financement devrait être assuré de façon durable, selon Avenir Suisse. Le think tank propose une baisse du taux de conversion et confierait sa détermination au Conseil de fondation. Si les caisses étaient en concurrence, il n’en résulterait pas un nivellement par le bas. Le taux de conversion ne pourrait pas être trop fortement réduit sous peine de faire fuir les clients. Il est également possible d’abolir l’âge légal de la retraite, comme en Suède. Aujourd’hui, un gestionnaire de caisse doit respecter 1800 normes. Il est temps de simplifier le système, de permettre des comparaisons en augmentant la transparence et de rendre le financement pérenne, selon Avenir Suisse.

Les réformes ne sont possibles en Suisse qu’en tirant les leçons des échecs du passé, en Suisse et ailleurs. Il faut éviter, par exemple, de concentrer l’attention sur le seul taux de conversion en ajoutant une autre dimension, comme la baisse du montant de coordination. Avenir Suisse propose aussi de créer des automatismes comme au Danemark, où l’âge de la retraite est couplé à l’espérance de vie.

Certaines idées ne peuvent pas être mises en oeuvre immédiatement, mais on pourrait prévoir des périodes transitoires assez longues. Le premier paquet de propositions conduit à terme à la définition par l’assuré de la stratégie de placement et à l’adoption du taux de conversion par le Conseil fédéral.

Le deuxième paquet de réformes cherche à établir une prévoyance liée à l’employé plutôt qu’a l’emploi, ainsi que le choix des paramètres techniques par le conseil de fondation (comme au Liechtenstein).

Cet article est paru dans «Le Temps» du 28 Septembre 2012.