En Suisse, la croissance de l’urbanisation s’accélère imprimant ces dernières années un nouvel élan au débat sur l’aménagement du territoire. Les réactions politiques que cette évolution suscite se focalisent sur la scène fédérale. Pourtant, les cantons jouent un rôle clé en matière d’aménagement du territoire. Le nouveau monitoring cantonal d’Avenir Suisse tient compte de cette réalité et présente le premier relevé exhaustif des instruments cantonaux de gestion de l’urbanisation. Le monitoring révèle de profondes différences dans la qualité des instruments d’aménagement du territoire utilisés par les cantons. Comme attendu, les cantons urbains arrivent en tête du classement général. De même, les petits cantons se positionnent en fin de classement. Toutefois, malgré des similitudes structurelles, ou trouve de grandes différenciations dans le classement. L’étude aboutit à la conclusion que le développement territorial ne peut être réellement maîtrisé que si les autorités responsables parviennent à défendre les buts et principes généraux vis-à-vis des intérêts particuliers locaux.

Depuis 2002, une surface équivalente à celle du lac de Walenstadt (SG) est nouvellement construite chaque année en Suisse. Dans 23 cantons sur 26, l’extension de la surface urbanisée est supérieure à la croissance démographique. L’objectif formulé par le Conseil fédéral en 2002 de limiter la surface construite à 400m² par habitant est aujourd’hui déjà dépassé. Cette évolution ne va pas dans le sens d’un développement durable. Elle ne respecte par les buts et principes de l’aménagement du territoire ancrés dans la Constitution fédérale et dans la loi fédérale sur l’aménagement du territoire qui demandent de veiller à «une utilisation judicieuse et mesurée du sol» et de ménager le paysage. Une initiative populaire de la Fondation pour la protection du paysage demande par conséquent un moratoire de 20 ans sur les nouvelles zones constructibles. Le contre-projet indirect que le parlement veut lui opposer est une révision de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire.

La concrétisation des objectifs d’aménagement du territoire incombe aux cantons qui s’acquittent de cette tâche avec plus ou moins d’efficacité. La surface urbanisée progresse de même que la dispersion des constructions dans le paysage. Les zones à bâtir surdimensionnées et surtout les réserves à bâtir mal situées sont en cause. Les terrains à bâtir en périphérie sont moins chers et la dispersion des constructions se trouve favorisée. Un instrument cantonal efficace favorisant un développement concentré de l’urbanisation fait cruellement défaut. Pour mener à bien cette étude, Avenir Suisse a conduit 26 entretiens d’experts avec des représentants des administrations cantonales, puis effectué des recherches complémentaires. Le monitoring cantonal permet de comparer les divers instruments de maîtrise de l’urbanisation utilisés dans les cantons. La prise en compte de 32 instruments répartis en 6 domaines spécifiques et, pour chaque domaine un classement partiel, permet d’établir le profil des forces et des faiblesses de chacun des cantons.

Cette étude comparative fait ressortir un problème majeur, qui reste à résoudre: les lacunes constatées dans les cantons concernant la bonne exécution des dispositions de l’aménagement du territoire dans les communes. S’inspirant du modèle de la protection des forêts, le monitoring cantonal préconise la mise en place de standards plus contraignants au niveau fédéral, en particulier concernant la politique de gestion des zones à bâtir. Les incitations financières qui permettent d’associer les communes au processus d’aménagement du territoire, notamment dans le cadre des projets d’agglomération, jouent un rôle très important. Le but de la révision de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire et des réformes cantonales à venir devrait être, non pas d’alourdir la réglementation existante, mais de rendre plus efficace la gestion de ce domaine politique d’une importance cruciale pour le futur de la « Ville-Territoire Suisse ».