Le quatrième article de la série met en lumière les problématiques liées à la redevance obligatoire, sujet de controverse discuté entre autres à l’occasion du dernier Séminaire romand de réflexion lors duquel plus d’une soixantaine de personnalités romandes, provenant du monde médiatique, politique, entrepreneurial et académique, se sont réunies pour un débat animé sur la question de l’avenir des médias privés et publiques.

La redevance: Service public ou avantage comparatif déloyal?

Les tentatives visant à plafonner la redevance audiovisuelle à 200 CHF ont fait long feu au Parlement. Reste que cette taxe obligatoire, que certains vont jusqu’à assimiler à un impôt, suscite l’ire des privés qui ne se privent pas de dénoncer la prétention de la SSR, à leurs yeux, de vouloir le beurre et l’argent du beurre.

Pourtant, cette redevance profite aux radios et TV privées. De manière marginale, certes, avec ses 50 millions sur 1,3 milliards de francs. Mais tous ne s’en plaignent pas. Au contraire, certains trouvent le statu quo et la collaboration entre les petits diffuseurs et la grande SSR plutôt confortable.

En l’état, cette dernière en tire 75% de ses revenus. Forcément que le montant de cette fameuse redevance suscite la zizanie. Adaptée pour la dernière fois en 2007 avec une hausse de 2,7%, la SSR la considère amplement justifiée, compte tenu que le renchérissement entre 2001 et 2011 a été supérieur à cette hausse. Sur les 462 CHF que tous les Suisses versent, 415 CHF vont dans les caisses de la SSR, soit seulement 1,14 CHF par jour et par foyer. C’est tout à fait supportable pour le porte-monnaie pour garantir la réception des programmes de qualité et pour tous les publics, et pour assurer des programmes en quatre langues. En comparaison à une élévation de 7% en dix ans en Suisse, les Allemands ont supporté une augmentation de 25% et les Italiens de 20%. À travers également des prestations pour le cinéma, la musique et la culture, la SSR se considère comme un lien national important et assure jouer un rôle de laboratoire à l’intention de publics fragmentés en Suisse.

Au contraire, les éditeurs privés parviennent à des tout autres calculs. Entre aujourd’hui et 1987 où elle ne coûtait que 279 CHF, la redevance à crû plus vite que la population. De surcroit, alors que l’évolution de la publicité dans la presse écrite entre 2001 et 2009 chutait d’un tiers de son chiffre annuel, soit d’un milliard de francs, les médias électroniques augmentaient la leur de 7%, soit à 737 millions de francs. En 2010, le taux de pub TV enregistrait une croissance de 13,5% contre seulement 4,5% pour la presse écrite.

Si la redevance procure une existence forte à la SSR, elle lui impose forcément un questionnement sur ces activités de commercialisation. Même si certains esprits semblent persuadés du contraire, il semble difficile, voire impossible de financer une télévision en Suisse romande et encore plus dans la partie italophone par les ressources privées. Autrement dit, la SSR ne tirera sa légitimité que si elle offre une véritable plus-value intellectuelle. D’autant plus que les éditeurs privés ne tirent qu’une modeste aide indirecte par la Poste de 30 millions de francs par an et que, du point de vue de la liberté de la presse et de la concurrence, il n’est pas très sain de vouloir leur accorder des subventions.