Anna-Joséphine Dufour-Onofrio | Hedwig Scherre

Anna-Joséphine Dufour-Onofrio, entrepreneuse dans la soie

Dans la vie, rien ne se passe jamais comme prévu. Fille d’un industriel et originaire de Lyon, Anna Joséphine Dufour-Onofrio perd son époux Pierre Antoine à seulement 25 ans. Elle se retrouve seule avec son fils et la fabrique de soie Dufour & Cie, en pleine expansion, à Thal, près de Rheineck (SG). Contre l’avis et les attentes de ses proches, elle reprend l’entreprise et poursuit l’œuvre de son mari avec beaucoup d’énergie.
Lorsqu’elle prend la tête de Dufour & Cie en 1842, 50 métiers à tisser sont en service. Seulement quelques années plus tard, l’entreprise en compte 600, et emploie 1000 personnes. La fabrique se spécialise alors dans la production de tissus de soie à bluter (tamiser la farine) qui permettent aux meuniers de produire des farines de qualités différentes à partir d’une seule variété de céréale. En 1855, les tissus de soie à bluter Dufour obtiennent la plus haute distinction à l’Exposition universelle de Paris. Grâce à la demande importante en Suisse et à l’étranger, cette pionnière de l’industrie parvient à développer ses activités.
Durant cette période prospère, «Madame D.», comme on l’appelle couramment, n’oublie pas ses employés. Elle finance la construction d’un nouvel hôpital et de logements d’habitation. Elle crée aussi une caisse d’assurance maladie et un fonds de pension destinés à son personnel. Toujours modeste, elle poursuit avec intérêt ses activités jusqu’à un âge avancé.
Aujourd’hui, Anna Joséphine Dufour-Onofrio remporterait probablement tous les prix récompensant un entrepreneur à succès: elle s’est distinguée par son courage, son esprit novateur et social, et sa réussite. Elle a su prouver à ses contemporains dubitatifs que le succès n’est pas lié au sexe et que les femmes peuvent, elles aussi, être d’excellents entrepreneurs. Existant encore sous le nom de Sefar, son entreprise a su se faire un nom dans le monde entier grâce à ses tissus monofilaments de précision.

L’ensemble des portraits des pionnières de la Suisse moderne fera l’objet d’une publication dans un livre qui paraîtra à l’automne 2014, édité par Avenir Suisse, les Editions Slatkine et Le Temps. A précommander ici