Gertrud Haemmerli-Schindler

Gertrud Haemmerli-Schindler a de la chance. Née de bonne famille le 7 septembre 1893 à Zurich, elle passe une belle enfance avec ses trois frères dans une maison à pignons. Son père est directeur de la fabrique de machines-outils Oerlikon. À cette époque là, au début du XXème siècle, il serait facile, et même logique, de se marier et de mener une vie discrète en tant qu’épouse et mère exemplaires. Mais Gertrud veut plus que cela.

La jeune femme choisit son propre chemin et se meut dans un environnement où elle doit faire ses preuves toute seule, sans réseau de relations. Après s’être occupée d’enfants victimes de la Première Guerre mondiale, elle voyage en 1919 aux États-Unis. Elle s’inscrit à une école d’infirmières à Baltimore, seule Européenne parmi 600 Américaines et Canadiennes. Pendant des vacances en Suisse, elle rencontre le cardiologue Theodor Haemmerli, qu’elle épouse seulement trois mois plus tard. Aux côtés de son mari, elle peut continuer à exercer le métier de son choix, d’abord dans une clinique internationale au bord du lac Léman, puis à Zurich. En 1932, quand la crise économique mondiale conduit beaucoup de familles au chômage et à la misère, l’infirmière engagée crée la «Société d’assistance aux mères» (« Mütterhilfe ») qui prend en charge des mères célibataires et des femmes involontairement enceintes. Elle présidera cette organisation pendant 30 ans. Mais ce n’est pas tout.

L’imminence de la menace de la guerre réveille en beaucoup de femmes le désir de s’engager pour leur patrie. Gertrud Haemmerli-Schindler crée alors le Service civil complémentaire féminin dans le canton de Zurich, et en devient la responsable nationale à partir de 1942. L’organisation parallèle au Service féminin de l’armée s’adresse aux femmes dont la disponibilité est limitée à cause de leur famille ou leur travail, mais qui veulent quand même s’engager pour la société. Les activités du Service civil complémentaire féminin civile sont très diverses : aide aux soldats et aux paysannes, assistance de quartier, collectes et, pas la moindre, accueil et soins d’enfants refugiés des pays voisins. «L’arrivée de ces petites victimes de guerre dans la nuit et le brouillard, avec leur petits balluchons de vêtements, nous a touché au cœur plus que tout, et nous a impressionnés à chaque fois».

Son mari s’éteint déjà en 1944. Après la guerre, Gertrud Haemmerli-Schindler devient présidente du Centre de liaison des associations féminines zurichoises, et plus tard de l’Alliance de sociétés féminines suisses. Dans ses innombrables fonctions, elle lutte jusqu’à sa mort en 1978 pour ces droits des femmes qui nous semblent aujourd’hui tellement évidents.

L’ensemble des portraits des pionnières de la Suisse moderne feront l’objet d’une publication dans un livre qui paraîtra à l’automne 2014, édité par Avenir Suisse, les Editions Slatkine et Le Temps. A précommander ici