Figure de cire de Marie Grosholtz, alias Mme Tussaud

La vie de cette femme commence tout en bas et se termine tout en haut. Marie Grosholtz est née en décembre 1761 à Strasbourg, probablement hors mariage, fille d’une domestique prétendument bernoise. Elle n’est pas prédestinée à une brillante carrière brillante, mais elle y parviendra quand même. Quand, devenue Madame Tussaud, elle s’éteint à Londres en 1850 à un âge avancé, elle lègue à ses fils une entreprise florissante.
L’ascension de Marie Grosholtz commence à Berne, où sa mère tient le ménage du médecin bernois Philippe Curtius. Curtius, qui selon certaines sources pourrait être le père ou l’oncle de Marie, réalise des figures en cire et les expose. En 1767, la «famille» déménage avec son cabinet de figures à Paris. Marie apprend le métier de son père nourricier et est témoin de la Révolution française. Cela lui donnera l’occasion plus tard d’épicer ses mémoires avec des récits lugubres et effrayants. Ses souvenirs sont le fondement de son concept de marketing. Elle prétendra par la suite avoir personnellement connu les personnalités historiques qu’elle modelait en cire, et avoir fait fabriquer les têtes de la famille royale française guillotinée sur le modèle des têtes originales. Qui ne voudrait pas voir ça?
Après la Révolution à Paris, plus personne ne s’intéresse plus aux figures en cire. En 1802, Marie Grosholtz, épouse Tussaud depuis son mariage en 1795, émigre en Angleterre avec le cabinet hérité de Curtius en 1794, sans son mari alcoolique mais avec son fils de 4 ans. Son fils cadet reste en France. Cette artiste douée pour la cire et grand talent en autopromotion ne rentrera plus jamais en France. Son deuxième fils la rejoindra en Angleterre en 1822.
Durant plus de 30 ans, Madame Tussaud fait la tournée des fêtes foraines avec ses figures «plus vraies que nature» de Louis XVI, Marie-Antoinette, Voltaire ou Robespierre, et crée ainsi la base de son succès. En été 1835, elle inaugure son entreprise de famille «Madame Tussaud et fils» sur Baker Street à Londres. Aujourd’hui, «Madame Tussauds» appartient à une grande entreprise de divertissement.
Savoir si Marie Grosholtz était vraiment Suisse reste controversé. Dans ses mémoires, enjolivées de légendes, elle et ses descendants célèbrent leur origine suisse. «L’actuel chef de famille en personne», écrit ainsi la Neue Zürcher Zeitung en mai 1925, «atteste que tous les descendants de la vieille dame sont beaucoup plus fiers de leur origine suisse que de leur nom français, qui est seulement la conséquence d’un mariage malheureux, et qu’ils n’ont jamais oubliés que le cabinet était une attraction à Berne bien avant qu’il ait été transféré à Paris et à Londres.»

L’ensemble des portraits des pionnières de la Suisse moderne feront l’objet d’une publication dans un livre qui paraîtra à l’automne 2014, édité par Avenir Suisse et Le Temps. A précommander ici