En Suisse, bientôt un tiers des habitants seront issus de l’immigration, si l’on compte les naturalisés et les «secondos». Pourtant les problèmes d’intégration sont bien moindres que dans des pays avec la moitié moins d’immigrés, comme l’Allemagne, la France ou les Pays-Bas. L’OCDE reconnaît d’ailleurs à la Suisse une capacité d’assimilation supérieure à la moyenne: les trois quarts des immigrés en âge de travailler (15 à 64 ans) ont un emploi. Le taux d’activité des immigrants – un autre fait marquant – est inférieur de seulement 5 points de pourcentage à celui des Suisses.
Les immigrés ne vivent pas dans des ghettos
Ce succès témoigne du bon fonctionnement de deux institutions capitales dans l’intégration des étrangers: un marché du travail flexible et un flux d’immigrés directement lié à la demande de travail entraînent un taux de chômage relativement bas chez les étrangers. En même temps, l’immigration attirée par l’État social est freinée par les mécanismes de lutte contre les abus. Le haut niveau de qualification des immigrés facilite aussi l’intégration, de même que leur origine. La plupart proviennent des pays voisins, partagent langue et culture, et s’intègrent relativement aisément.
Les écoles remplissent aussi correctement leurs devoirs d’intégration. Enfin, le système d’apprentissage professionnel, souvent sous-estimé, facilite d’une part l’accès au marché du travail des immigrés avec un faible niveau de formation et d’autre part un processus de socialisation efficace.
La faible ségrégation spatiale distingue aussi la Suisse des autres pays européens. Ce type de ségrégation est créateur de ghettos ainsi qu’en témoignent les banlieues françaises. Une autre particularité suisse, la pression sociale à l’intégration, fait directement partie de la vie quotidienne. Le professeur Dieter Freiburghaus l’a formulé ainsi: «Dans notre fors intérieur, c’est le règlement de la buanderie qui nous unit.»
La Suisse se range donc au sein des pays d’immigration classiques, comme les États-Unis ou l’Australie, et se distingue ainsi de ses voisins européens. Le niveau constamment élevé d’immigration, d’environ 70 000 par an, constitue toutefois un défi: quand la limite à la capacité d’intégration de la Suisse sera-t-elle atteinte?