Les finances des communes suisses sont en meilleure forme qu’il y a dix ou vingt ans. Le niveau d’investissements est raisonnable, dans la plupart des communes, ils sont autofinancés. Par conséquent, les dettes communales s’allègent année après année. De plus, rares sont aujourd’hui les communes incapables de gérer leurs obligations à cause d’une surcharge de travail ou d’une incompétence professionnelle.
Pourquoi assistons-nous alors à une pareille vague de fusions intercommunales, touchant déjà la moitié des cantons? Les comptes des communes ne pourraient-ils pas cacher une partie de la vérité?
- La très grande majorité des communes peine à attirer les bonnes volontés. Qui accepte encore de se porter candidat à des responsabilités exécutives ou politiques? La principale raison tient au déplacement des priorités dans les communes. Après s’être concentrée sur des tâches politiquement incontestables, des déchets aux services du feu, la politique communale porte aujourd’hui sur des thèmes beaucoup plus controversés. Pensons à la politique des étrangers, à la politique sociale, à l’aménagement du territoire, aux politiques de construction, des transports et de la jeunesse. Leur gestion ne produit pas les mêmes «bénéfices» que dans le passé, en termes de réputation et de pouvoir. Par contre, les engagements sont de plus en plus lourds, en travail et en temps, ainsi que dans la prise de risque personnelle. Le déséquilibre a même tendance à s’accentuer.
- L’autonomie communale effective est bien plus restreinte que ne le suggère un regard superficiel sur les habituels indicateurs (par exemple la relation entre les dépenses des cantons et des communes). Les compétences réglementaires appartiennent de plus en plus aux cantons, alors que les communes sont réduites à un rôle de simple exécutant.
- Une part croissante des tâches centrales de la vie des communes est confiée à la coopération intercommunale. L’autonomie des communes concernées en est ainsi sensiblement limitée. Cette coopération éloigne le citoyen de ses autorités. Pratiquement dans chaque domaine concerné par cette coopération, il est bien plus compliqué d’offrir aux citoyens les instruments décisionnels de la démocratie directe. La situation est pire que si la nouvelle commune issue de la fusion accomplissait les tâches elle-même.
Un avenir durablement doré?
La situation financière des communes, aussi confortable soit-elle, n’est pas nécessairement la preuve que les structures sont adaptées aux défis actuels. La situation des finances publiques s’est améliorée depuis la crise immobilière et la faible croissance économique qui avaient marqué les années 1990. Certains cantons ont distribué aux communes une partie des gains issus de la vente de l’or de la BNS en 2005, gains qui ont pu être utilisés pour l’amortissement des dettes communales. Ensuite, de nombreux cantons ont augmenté les transferts aux communes dans le cadre de la modernisation des systèmes de péréquations financières. Finalement, les communes ont bénéficié de la baisse des coûts liée à la centralisation de leurs tâches.
Les incertitudes liées au sort de la zone euro nous empêchent d’espérer à court terme une croissance économique proche de celle des années 2000. De plus, les gains exceptionnels liés à l’or de la BNS ne se répéteront plus. Rien n’exclut bien sûr une poursuite de l’amélioration de la situation financière de beaucoup de communes. Mais une détérioration n’est pas moins probable, surtout si les communes s’arcboutent sur des structures obsolètes et une compréhension anachronique de leur autonomie.
Pour plus d’informations sur ce même sujet, consultez l’étude d’Avenir Suisse «Autonomie communale entre illusion et réalité».