En 2015, pour la première fois en Suisse, davantage de personnes fêteront leur 65e anniversaire que leurs 20 ans. Cette vague de départs à la retraite des baby-boomers va encore accentuer le manque actuel de main-d’œuvre qualifiée. Le recours à une main-d’œuvre étrangère pour combler cette lacune reste incertain après l’acceptation de l’initiative «contre l’immigration de masse». La définition et la mise en place de mesures politiques correspondantes prendra du temps. Face à cette incertitude, les entreprises vont chercher des solutions dans leur sphère d’influence. Retenir leurs employés plus âgés et expérimentés est une piste toujours plus importante.

De la sécurité pour tous

S’il était possible de garder chaque nouveau retraité deux mois de plus au travail, l’équivalent de 5000 postes pourrait être pourvu, sans devoir recourir à quelconque contingent. Par ailleurs, si chaque employé âgé pouvait travailler une année de plus, mais à un taux d’activité de 50 %, l’équivalent de 15 000 emplois par an pourrait être créé. Le grand avantage: ces personnes sont qualifiées et intégrées dans leur entreprise. En outre, il est fort peu probable qu’elles résilient leur contrat dans les mois qui viennent. La fidélisation des employés plus âgés permet de préserver au sein de l’entreprise des savoirs précieux sur les produits, les processus, les fournisseurs et les clients. Ce dernier point devient de plus en plus important car le marché des seniors est en forte croissance. Pour régler leurs questions d’héritage, de finances, d’achat d’appareils techniques ou de travaux de rénovation, les clients plus âgés, souvent bien doté financièrement, préfèrent être conseillés par des personnes senior qui comprennent mieux leurs besoins que des collaborateurs plus jeunes.

Changement d’état d’esprit requis

L’activité professionnelle des personnes d’un âge avancé nécessite cependant un changement d’état d’esprit de la part des employés tout comme des employeurs. L’idée d’un salaire qui augmente en fonction de l’âge est désormais dépassée, même si de telles politiques salariales sont toujours pratiquées au sein de 26 % des entreprises. Ces politiques sont à éviter car elles augmentent les coûts salariaux des employés plus âgés et favorisent ainsi leur éviction du marché de travail. Si d’un coté, les employés doivent renoncer à une augmentation automatique de salaire, de l’autre, des emplois répondant mieux à leurs attentes doivent être créés, par exemple, offrant plus de souveraineté dans l’organisation du travail, mais aussi plus de flexibilité pour s’occuper de la famille. En même temps, ils sont désireux de faire profiter leur entourage de leur expérience et de leur savoir-faire. Une activité régulière à temps partiel ou lors de goulots d’étranglement dans la production peut, par exemple, aider à réaliser un passage à la retraite en douceur, tant pour l’employé que pour l’employeur.

Les «emplois pour seniors» ne sont pas réservés aux cadres avec formation académique. Au contraire, c’est un modèle qui se prête aux employés de chaque échelle hiérarchique et à toutes les branches, dans le secteur des services comme dans l’industrie (voir encadré). Les personnes plus âgées doivent être employées dans des domaines d’activités où leur expérience avec la clientèle et leur connaissance des produits peut être spécialement mise en valeur, par exemple dans les services à la clientèle, dans le service d’offres ou pour le maintien de systèmes IT ou de machines-outils moins récents. Dans ce dernier cas, il s’avère souvent trop cher de former de nouveaux employés rien que pour quelques interventions, alors que des personnes plus âgées les connaissent encore par cœur.

Avantages compétitifs au profit de tous

Les profils d’exigence étant différents pour des employés plus âgés, il est possible qu’ils requièrent de nouveaux processus de travail. Néanmoins, ils permettent tant aux employés qu’aux entreprises de générer des avantages compétitifs et de les mettre au profit de tous.

Exemples pratiques d’emplois pour personnes plus âgées

Production

  • Les boulangeries peuvent pallier les hausses de production (p.ex. pendant les fêtes comme Pâques ou Noël, ou les week-ends) grâce à l’emploi ponctuel d’employés plus âgés.
  • Les garagistes peuvent employer des personnes plus âgées à temps partiel pour des réparations des voitures anciennes («Oldtimer»).
  • De même, les producteurs de machines-outils peuvent ainsi garantir le maintien de machines anciennes.

Vente

  • Jelmoli renonce aux jeunes collaborateurs quant à la vente de marques qui s’adressent à une clientèle plus âgée.

Service clientèle

  • Le service d’aide en ligne de Swisscom transmet les appels des personnes d’un âge au-delà de 65 ans à une équipe de collaborateurs ayant eux-mêmes plus de 50 ans.

Coaching/Formation

  • Avec Consenec, ABB a créé une entreprise offrant des services de conseils aux partenaires externes et internes. Les cadres de plus de 60 ans doivent intégrer cette entreprise.
Cet article a été publié dans «Zürcher Wirtschaft» le 16 octobre 2014.