Les loyers suivent les mouvements des taux d’intérêt et de l’inflation. Ainsi le veut le droit suisse du logement. Cette approche suppose l’existence d’un rendement «équitable» dans la location de logements. Le principe de lier le taux d’intérêt aux loyers existe formellement depuis 1990. Le concept d’abus résultant d’un rendement «excessif» est plus ancien. Il date de 1972 et a pratiquement obtenu force de loi. Durant ces 40 ans, le lien entre le taux d’intérêt et le loyer s’est imposé comme une évidence. Pourtant, un tel lien ne devrait pas exister sur un marché du logement qui fonctionne.
L’effet d’un faux signal des prix
Ce lien artificiel entre taux d’intérêts et loyers crée des problèmes bien réels, dans le contexte actuel d’immigration, de risque de déflation et de très bas taux d’intérêt. La croissance démographique engendre des pressions haussières sur la demande d’espace locatif. Normalement, face à une telle situation, la cherté des loyers signale la nécessité d’un accroissement de l’espace locatif. La loi impose exactement l’inverse. Ainsi, plusieurs fois les loyers des anciens baux ont dû être abaissés parce que le taux de référence de la BNS est passé de 3,5 % en 2008 à 2,5 % aujourd’hui. Cette baisse justifie à elle seule une diminution des loyers de 11 %.
Le signal des prix est faussé et provoque la pénurie. La demande non satisfaite se précipite sur l’étroit segment des domiciles qui de facto (mais pas de jure) ne sont pas soumis au contrôle des prix: les nouveaux logements et les relocations. Les loyers de ces logements augmentent alors plus que proportionnellement. Le mécanisme provoque une segmentation exacerbée du marché.
Le lien entre les taux d’intérêt et les loyers entrave aussi la politique de la BNS. Si elle accroît les taux d’intérêt pour combattre l’inflation, l’effet inverse se produit: les loyers augmentent. Avec une pondération de 20 % dans l’indice des prix à la consommation, ils jouent en effet un rôle majeur dans la structure des prix et accroissent ainsi l’inflation. Si la banque centrale – comme aujourd’hui – veut baisser ses taux d’intérêt pour lutter contre les risques de déflation, la baisse des loyers agit également à l’inverse de ses intentions.
L’actuel droit du logement – et le lien entre les taux d’intérêt et les loyers – n’est certainement pas une solution.