La Suisse a mieux réussi que beaucoup d’autres dans la quête de performance, importante pour la compétitivité du pays.
Avenir Suisse propose dans une nouvelle étude une explication simple, efficace et probante du succès international de l’innovation suisse. En effet, en tête des classements internationaux en innovation depuis quelques années, la Suisse a mieux réussi que beaucoup d’autres pays dans cette quête de performance tellement importante pour la compétitivité du pays. Cependant personne ne semble vraiment savoir pourquoi ou plutôt tout le monde à une explication, évidemment différente ce qui revient au final à peu près au même. Si la Suisse performe si bien en innovation, on pourrait supposer qu’elle a très bien appliqué le modèle de la Silicon Valley, modèle que tout le monde envie à la Californie. En fait, une rapide analyse montre que ce n’a pas été pas le cas, essentiellement parce que la Suisse n’a voulu (ou pas pu) copier la partie finale du modèle à savoir le capital risque, le marché vivace des IPO (Initial Public Offer) et l’enrichissement rapide, souvent excessif des acteurs du monde des start-ups comme le font si bien les Américains.
Il faut donc chercher ailleurs les raisons du succès. Les statistiques le dévoilent: en Suisse, les investissements en R&D du privé qui représentent plus des 3/4 de l’effort national en innovation, vont en majorité vers un seul secteur celui de la santé – au sens large – c’est-à-dire incluant la médecine, la pharma, le medtech, la biotech, la bio-informatique, les alicaments, l’hygiène, etc. En regard de ces investissement très importants, il existe le dépôt de très nombreux brevets propres à ce secteur et l’appui de nombreux scientifiques et techniciens engagés dans le processus de recherche et d’innovation. Ceci expique définitivement les excellents classements internationnaux de l’innovation suisse. Dès lors se pose la question: que faire pour maintenir un tel avantage compétitif? Avenir Suisse fait des propositions, dont trois principales:
Une incitation fiscale à l’innovation
Le système fiscal suisse ne prévoit pas explicitement d’encouragement destinés aux entreprises qui font de la R&D. La solution la plus simple reste le crédit d’impôt d’innovation qui consisterait, selon différentes modes à pouvoir alléger la charge d’impôts pour les entreprises concernant leurs engagements et leurs dépenses pour l’innovation. De nombreux grands pays (États-Unis, Canada, Angleterre, Espagne et France) ont déjà mis en place un tel instrument. fine s’agit cependant pas d’encourager tel ou tel secteur par cet outil mais de créer plutôt une émulation à long terme pour l’innovation. Ce dispositif doit donner aux entreprises, notamment aux PME, plus de liberté de manoeuvre face aux processus d’innovation. Le principe des R&D Tax Credits doit s’inscrire en coordination avec l’ensemble de nos propositions.
Une répartition de tâches entre privé et public
La publication met enfin l’accent sur la nécessité de faire porter davantage le risque de l’innovation de rupture par l’État. Il ne s’agit pas d’investir en capital risque, ni dans des parcs technologiques ou scientifiques mais bien de subventionner en priorité les projets d’innovation de rupture. La Confédération à travers son principal organisme, la Commission pour la technologie et l’innovation (CTI), a tendance à soutenir des projets d’innovation incrémentale peu risqués et faciles à mettre en oeuvre. Ces derniers devraient cependant être l’apanage des entreprises et ne devraient donc pas bénéficier du soutien des pouvoirs publics. Tout au contraire, l’innovation de rupture à l’image de la recherche fondamentale devrait être largement l’affaire des pouvoirs publics. Une telle répartition des tâches autoriserait trois orientations: chacun serait à sa place dans sa fonction première, la Suisse dans son ensemble bénéficierait de plus de projets innovants et créatifs et la commercialisation des nouveautés serait d’abord confiée aux réseaux d’entreprises existants. Ce qui est proposé ici est une révision complète de la politique d’investissement de la CTI en mettant en avant de nouveaux principes sur le rôle des pouvoirs publics face à l’innovation de rupture. Cette révision est nécessaire et inévitable si nous voulons à l’avenir maintenir notre position dominante dans le domaine de l’innovation.
Une stratégie du Spillover
La Suisse est un territoire de proximité pour lequel le développement de synergie, de convergence, de «spillover» de tous les acteurs de la santé est facilité par les faibles distances. La convergence historique entre life sciences, médecine, pharma, bio-tech, medtech, bio-informatique, nutrition, hygiène, etc. devrait permettre d’offrir un plateau national à l’innovation en créant de nouvelles passerelles de l’innovation organisées horizontalement entre secteurs économiques proches. Cela devrait passer d’abord par une nouvelle définition de l’économie de la santé puis par un renforcement de nouveaux programmes globaux comme ceux qui se profilent dans la nano, le cerveau (Human Brain Project), les nouveaux matériaux (graphène) et de l’ «additive manufacturing». En bref: il faut considérer la Suisse comme un plateau pour l’innovation dans le domaine de la santé.
Cet article a paru dans «L'Agefi» du 15 novembre 2013.