Le mandat de politique monétaire et l’indépendance de la plupart des banques centrales importantes sont aujourd’hui plus ou moins comparables. En revanche, il subsiste d’importantes différences du point de vue de la structure de la propriété et du mécanisme de distribution des bénéfices.

Les cas particuliers de la Suisse et des Etats-Unis

La Banque nationale suisse est une société anonyme de droit public avec des actionnaires publics et privés, ainsi que des titres cotés en bourse. Cela ne reflète pas seulement le processus de création compliqué de la BNS, mais aussi le caractère fédéral, coopératif, de la Suisse.

Le système de la Réserve fédérale aux Etats-Unis est certes une institution étatique, mais elle compte des actionnaires privés. Ceux-ci perçoivent un faible dividende fixé par la loi comme compensation du fait que la Fed ne paie pas d’intérêts sur les avoirs des banques auprès de la banque centrale. Le budget fédéral américain se taille la part du lion. La plupart des autres banques centrales sont constituées comme des institutions de droit public de l’Etat central – et, par conséquent, leurs bénéfices vont au budget de l’Etat central par l’intermédiaire du département des finances.

Dans le cas de la BNS, la répartition des bénéfices se fait dans le cadre d’un accord limité dans le temps entre le Département fédéral des finances et la BNS. Le bénéfice restant après prélèvement d’un dividende de maximum 6% du capital des actions va pour un tiers à la Confédération et pour deux tiers aux cantons. Selon l’accord en vigueur, qui vaut jusqu’à la fin de l’exercice en cours, le prélèvement s’élève à 1 milliard de francs (si la réserve pour distributions futures ne devient pas négative après l’affectation des bénéfices). Auparavant, 2,5 milliards de francs par année étaient versés à la Confédération et aux cantons.

La politique de distribution se trouve sous pression

Avec l’abandon au début de l’année de la politique de taux plancher face à l’euro, la réglementation actuelle se trouve sous pression. D’une part, les bénéfices de la BNS pourraient être soumis à d’importantes fluctuations en raison des taux de change flexibles. Durant la période du taux plancher déjà, entre 2011 et 2014, le résultat annuel de la BNS a fluctué entre une perte de -8,1 milliards de francs et un gain de 38,3 milliards de francs.

D’autre part, la politique de distribution qui prévalait jusqu’à maintenant a aiguisé l’appétit de la politique pour les bienfaits provenant de la BNS. Et celui-ci augmentera encore avec les perspectives budgétaires plus moroses des pouvoirs publics.

Avenir Suisse a déjà critiqué le mécanisme de répartition existant et a proposé de le changer dans son livre «Idées pour la Suisse». Désormais, le moment semble opportun pour cela. Si ni la Confédération ni les cantons n’avaient de droit attitré sur des parts de bénéfice de la BNS, on tiendra davantage compte de l’importance grandissante du capital propre.

Les points-clés d’une affectation actualisée du bénéfice:

  • La BNS aurait besoin d’avoir les mains entièrement libres pour l’évaluation et la distribution de ses bénéfices. Les seuls principes directeurs pour cette décision devraient être la confiance dans la BNS et son indépendance, la stabilité de la valeur du franc, un capital propre robuste et des provisions abondantes.
  • Les compétences pour la constitution de réserves et de réserves monétaires devraient être exclusivement du ressort du directoire.
  • Un bénéfice excédentaire après constitution de réserves devrait être versé à un fonds de prélèvement extérieur à la BNS, dont la Confédération et les cantons continueraient à avoir une part, selon le système de répartition actuel. Seuls les bénéfices réalisés devraient être prélevés.

Avec cette nouvelle méthode de détermination et de répartition du bénéfice, la Confédération et les cantons devraient être conséquents à propos du mode de prélèvement et la BNS serait épargnée des luttes de répartition.