Il est souvent supposé que la libéralisation menace les services publics de base; dans les faits, c’est souvent l’inverse: le financement non transparent du service public l’empêche de remplir ses véritables fonctions. Dans un nouvel ouvrage, le think tank Avenir Suisse plaide dès lors pour la privatisation la plus étendue possible du service public. Il s’agit notamment d’insuffler davantage de concurrence dans les domaines de la santé, des médias ou des transports en commun. Le livre présenté jeudi à Berne dénonce d’abord une définition trop floue du service public, qui devient souvent l’enjeu de groupes d’intérêt comme les syndicats ou les entreprises publiques elles-mêmes. Ceux-ci jouissent ainsi de privilèges légaux, alors que les services subventionnés pourraient tout aussi bien être fournis dans un marché libre. Selon les auteurs, une véritable concurrence passe par un financement plus conséquent de la part des usagers, mais aussi la privatisation: la propriété de l’Etat conduit à trop de conflits d’intérêt et à une réticence politique à prendre des décisions judicieuses sur le plan économique, à savoir les libéralisations retardées voire oubliées.
Dans une feuille de route pour davantage de concurrence, l’ouvrage d’Avenir Suisse prône aussi le passage à un financement moniste des hôpitaux par les assurances maladie et la suppression de l’obligation de contracter, c’est-à-dire de donner la liberté aux caisses maladie de ne pas rembourser tous les médecins.
Pour les médias électroniques, la recette consiste à limiter le mandat de la SSR en matière de programmes et de prestations: les médias de service public ne devraient servir que de fournisseurs de contenu et renoncer également aux sites internet d’information destinés au grand public. A terme, c’est la privatisation de l’ensemble du service public qui devrait être visée. Swisscom, les groupes électriques et les groupes hospitaliers cantonaux pourraient faire partie d’une première vague. La Poste, les transports publics et les médias de service public devraient être privatisés «sur le long terme». L’Etat ne jouerait plus alors qu’un rôle subsidiaire dans ces secteurs, non plus comme fournisseur de prestations, mais comme demandeur de services voulus par la société, mais qui ne sont pas fournis par le marché. Intitulé «Mehr Markt für den Service public» («Plus de marché pour le Service public»), l’ouvrage des économistes Helmut Dietl, René L. Frey, Robert Leu, Urs Meister n’est disponible qu’en allemand.
Cet article est paru dans «L'AGEFI» du 24 février 2012.