Lors de la session du 31 mai au 18 juin, le Conseil national et le Conseil des Etats ont exigé plus de transparence dans le financement de la vie politique. En parallèle, le Conseil fédéral a annoncé qu’il allait durcir la réglementation imposée aux banques d’importance systémique. Les entreprises privées, en particulier, ont l’obligation d’informer de façon exhaustive et leurs rapports financiers doivent remplir des exigences légales strictes. La tendance est claire : outre les entreprises, les partis politiques sont désormais tenus de rendre compte de leurs flux de trésorerie. La Confédération, les cantons et les communes fournissent également des informations détaillées sur les recettes et les dépenses dans leurs comptes annuels. Même les associations, comme les fanfares ou les unions des paysannes, publient leurs comptes annuels.

Les syndicats suisses, en revanche, restent étonnamment opaques quand il s’agit de rendre des comptes sur leurs pratiques financières. Les comptes annuels de l’USS ne sont pas accessibles au public sur son site internet. Le rapport annuel de Travail Suisse, lui, est certes richement illustré, mais il ne donne aucune information sur les flux financiers. Finalement, Unia, le syndicat le plus radical de la branche, nous informe que les recettes syndicales s’élevaient à pas moins de 143 millions de francs en 2019, mais demeure vague sur leur provenance. Au moins, Unia révèle que la majorité de ses recettes est dépensée pour les quelque 1200 fonctionnaires syndicaux, alors que les indemnisations de ses propres membres ne représentent que 6 %. En Suisse, on a véritablement l’impression qu’une association d’élevage de lapins est plus transparente sur son financement que les grandes organisations syndicales.

Qui finance les syndicats ? (Shivendu Shukla Unsplash)

On ne peut donc que deviner d’où viennent les recettes des syndicats. Le partenariat social, vanté par le Conseil fédéral et surtout par la cheffe du Département de justice et police a en effet joué un rôle décisif dans l’odyssée menant à l’impasse actuelle dans la politique européenne. Cependant, les citoyens n’ont aucune information sur la manière dont ce «partenariat» est financé. Le dernier rapport du Seco sur la mise en œuvre des mesures d’accompagnement témoigne certes des activités bureaucratiques effrénées des partenaires sociaux pour empêcher la concurrence salariale. En revanche, le Département de l’économie fait profil bas sur les dizaines de millions de francs versés par la Confédération aux partenaires sociaux.

Impossible de savoir combien de millions de francs sont versés par les cantons pour les contrôles des partenaires sociaux dans les entreprises. Un récent jugement rendu par un tribunal de la région bâloise a établi que les indemnisations forfaitaires pour les inspections de chantiers étaient manifestement excessives et que les contribuables en payaient les frais. Afin de comprendre pourquoi les syndicats sont fondamentalement opposés à la politique européenne, mais aussi à toute libéralisation du marché du travail, il est nécessaire que leurs bilans soient rendus publics. C’est particulièrement important dans une démocratie directe et lorsque les syndicats sont financés par des fonds publics.

Cet article a été publié le 10 juin 2021 dans la Handelzeitung.