Ce fut donc un double non aux deux initiatives agricoles le week-end dernier et c’est tant mieux ! De nombreuses autres initiatives relatives à l’agriculture vont néanmoins encore nous donner du grain à moudre: l’initiative «pour les vaches à cornes», celle «pour une Suisse libre de pesticides de synthèse», «pour une eau potable propre», «contre le mitage» et «contre l’élevage intensif» (encore au stade de la récolte de signatures). Cette multiplication d’initiatives le prouve : quelque chose cloche dans la politique agricole actuelle. Et c’est aussi le constat que dresse Avenir Suisse dans sa dernière étude : «Une politique agricole d’avenir».

La politique agricole suisse coûte cher. Près de 20 milliards de coûts directs et indirects par année: c’est là un multiple des dépenses officielles de la Confédération pour l’«Agriculture et l’alimentation». Malgré toutes les mesures prises par les pouvoirs publics en faveur du secteur, les exploitations agricoles disparaissent, les paysans déplorent ─ à raison ─ des rendements insuffisants (malgré une charge de travail importante) et les objectifs environnementaux ne sont pas remplis.

Dès lors, pourquoi ne pas repenser complètement la politique agricole de demain, au lieu de s’embourber dans des solutions (plus d’étatisme, plus de protectionnisme) qui ne semblent pas porter leurs fruits et qui ne profitent finalement pas aux agriculteurs eux-mêmes? Pourquoi ne pas tenter des solutions ─ encore inédites dans ce domaine, mais qui ont fait leur preuves dans d’autres secteurs ─ comme plus de marché et moins d’interventionnisme?

A notre sens, cela ne correspond pas pour autant au «sacrifice de nos paysans sur l’autel du libre-échange»: bien au contraire! Les produits de nos agriculteurs sont prisés par les consommateurs suisses et ont toutes leurs chances sur les marchés internationaux.

Vache

Le double non aux initiatives du 23 septembre 2018, la voie à suivre pour les prochaines initiatives agricoles ?(Pixabay)

La réforme à laquelle Avenir Suisse propose de réfléchir vise avant tout à redonner des perspectives entrepreneuriales aux paysans en les libérant des carcans administratifs et des 4000 pages de prescriptions législatives qui les paralysent. Ces prescriptions ne sont en effet que le corollaire des innombrables soutiens financiers étatiques en faveur du secteur et elles limitent sévèrement la marge de manœuvre entrepreneuriale. Abaisser le niveau de subventionnement renforcerait aussi la position de négociation des paysans sur le marché; les subventions actuelles servant surtout à alimenter les marges des fournisseurs et grands distributeurs, lesquels peuvent ensuite faire pression sur les prix.

Enfin, la révision, à la baisse, de nos tarifs douaniers réduirait le niveau de prix des intrants et des denrées alimentaires, ainsi que le tourisme d’achat. Cela améliorerait le rapport qualité-prix des produits vendus en Suisse en introduisant plus de concurrence sur le marché des grands distributeurs.

Avenir Suisse plaide pour des mesures donnant les moyens à nos agriculteurs de vivre dignement du fruit de leur labeur et de la vente de leurs produits sur le marché. Nous misons sur des paysans fiers et faisant partie intégrante de notre économie ; non pas sur des paysans sous perfusion des transferts fédéraux étouffant leur capacité d’innovation.

Cet article est paru dans la Tribune de Genève le 28 septembre 2018 sous le titre «Pour la liberté d’exploiter des paysans»