En termes de politique financière, la formule est simple : si les dépenses courantes dépassent régulièrement les revenus dans les comptes de l’Etat, les dettes que les générations futures devront rembourser s’accumulent. Bien sûr, la levée de capitaux étrangers est appropriée pour certains investissements créateurs de valeur, car la population peut encore bénéficier de tels investissements dans 20 ou 40 ans, ce qui entraîne un transfert partiel de la charge financière vers la future génération. Cela dit, les investissements ne sont de toute façon pas inclus directement dans le compte final : seuls les amortissements correspondants le sont. Par conséquent, la constitution de la dette via le solde des produits et charges courants n’est jamais liée à une génération.
Toutefois, les produits actuels ne devraient pas être en permanence supérieur aux dépenses. La comptabilisation d’excédents de produits permanents montre que le taux d’imposition de la ville est fixé trop haut. Au mieux, les contribuables d’aujourd’hui paieront des impôts excessifs par rapport aux services reçus – pour le bénéfice des générations futures, qui bénéficieront d’impôts moins élevés avec lesquels la ville réduira son propre capital accumulé dans le futur. Si le pire devait arriver, les impôts ne seraient jamais réduits et les excédents, en faisant disparaître l’un des freins à une gouvernance inefficace, encourageraient le gaspillage de l’argent des contribuables. Toutefois, des excédents de produits permanents et importants peuvent également résulter de la nécessité de réduire la dette. Dans ce cas, ils sont les bienvenus. Ils n’en demeurent pas moins le signe d’une politique budgétaire antérieure malavisée – et qui n’était pas équitable sur le plan générationnel.
Le monitoring des villes
Dans le cadre de son monitoring des villes, Avenir Suisse a examiné les budgets des dix plus grandes villes suisses. Étant donné qu’une seule année n’est pas assez significative, une moyenne sur sept ans (2010-2016) a été utilisée pour l’élaboration de l’indicateur. Les produits courants ont été comparés aux charges courantes. Les données ont été collectées par l’Institut des Hautes Etudes en Administrations Publiques (IDHEAP) de l’Université de Lausanne.
Classement
Définitions : Charges / produits courants, (en %). Période évaluée : moyenne des années 2010-2016 1 Base de données : IDHEADP : Comparaison des finances des cantons et des communes 2 | |||
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Source : Propres calculs sur la base de l’IDHEAP |
Comparaison de la couverture des coûts des villes
Résultats
Ces dernières années, les dix grandes et moyennes villes examinées ont pu couvrir leurs dépenses courantes avec leurs revenus. Huit des dix villes ont un taux de couverture moyen supérieur à 100%, seules Winterthour et Lugano se situent juste en dessous de ce seuil. A Winterthour, cela s’explique par un déficit important en 2016. Lugano a également connu deux années de déficits importants en 2012 et 2013.
Saint-Gall et Lucerne ont été les moins performantes. Non en raison des déficits, mais à cause des excédents importants enregistrés sur de nombreuses années. A Lucerne, d’énormes excédents de recettes ont été dégagés, en particulier entre 2014 et 2016, tandis que Saint-Gall a dégagé des excédents stables et importants au cours des sept années sous revue. Dans les deux villes, une réduction d’impôt est donc nécessaire.
Le fait qu’aucune des dix villes étudiées n’accuse de déficit structurel est également imputable aux programmes d’austérité que la plupart des villes ont mis en œuvre, selon leurs propres chiffres, au cours des dix dernières années. Bâle, par exemple, souligne que l’épargne était ciblée et qu’il ne s’agissait pas d’«économies de tondeuses à gazon (Rasenmähereinsparungen)»3. Plusieurs villes soulignent l’importance d’une approche «bottom-up» : le potentiel d’économies devrait être identifié par les différentes directions, départements et bureaux, avec la participation facultative des employés. Un vaste programme d’allégement a été mis en œuvre à Saint-Gall : selon ses propres déclarations, un allégement d’environ 10 à 15 points d’impôt a été obtenu. Il était temps de répercuter ces excédents structurels sur les contribuables.
Vous trouverez de plus amples informations dans l’étude «20 ans de politique urbaine suisse».
1 Somme des charges courantes de 2010–2016 / Somme des produits courants de 2010–2016
2 Vous trouverez le rapport en question ici.
3 Des «économies de tondeuse à gazon» signifie des économies uniformes (et donc plutôt minimes) dans tous les services. Ce type de symétrie est souvent utilisé pour obtenir les majorités nécessaires à un programme d’épargne. Cependant, cette approche n’a pas de sens sur le plan économique. Des économies devraient être réalisées là où les gains d’efficacité les plus importants sont possibles ou là où des offres entières sont obsolètes.